Alice 2014, huile sur toile environ 120 x 100 cm
Courtesy Galerie Françoise Besson

artistes :
Antony Verot

Vernissage le 16 octobre à partir de 18:00

… /…Dans la querelle, Anthony Vérot a crânement choisi le parti des anciens : depuis des années, sa peinture n’est faite pour ainsi dire que de portraits, et qu’il ait recours à la photographie ne peut en aucun cas constituer une circonstance atténuante auprès du parti des modernes : le sublime portrait d’Olga daté de 1917 qui est dans les collections du musée Picasso est directement extrapolé d’une photographie prise dans l’atelier de l’artiste à Montrouge, et Ingres lui-même à la fin de sa vie s’aidait, dit-on, des ces clichés qui épargnaient de longues poses aux modèles. Le cas aurait pu être plaidé si Vérot s’était appliqué à singer mécaniquement les images produites par l’appareil photo, comme le font ou le faisaient les peintres hyperréalistes (que l’on nomme avec plus de justesse, outre- Atlantique, photo réalistes), à jouer du flou et de la précision, du grain, des imperfections parfois de la mise au point qu’on trouve dans les portraits photographiques, bref à payer un tribut ironique à la supposée objectivité de la chambre noire, ou de l’appareil numérique qui, aujourd’hui, en tient lieu. À jeter sur ses œuvres un regard rapide, on pourrait parfois penser qu’il le fait, tant les toiles et les œuvres sur papier témoignent de méticuleuse maîtrise technique, mais il suffit de s’y attarder plus que quelques secondes pour comprendre qu’il n’en est rien. Nous ne sommes pas face à des images naturalistes reproduites avec application par un tâcheron, ou par un artiste du second degré, mais devant le miroir très étonnamment déformant que Vérot tend à ses modèles, bref devant un travail de peinture, qui nous délivre à la fois une vérité factuelle de la morphologie des sujets qui ont posé, et la représentation mentale que l’artiste se fait de chacun d’entre eux — en somme la “façon de voir” que Reverdy rejetait, comme bon nombre de ses contemporains et des nôtres, avec mépris. Edward Hopper conserva toute sa vie, soigneusement pliée dans son portefeuille, une petite feuille de papier sur laquelle il avait recopié une phrase de Goethe, extraite d’une lettre de ce dernier à Jacobi : “ Le début et la fin de toute activité artistique, c’est la reproduction du monde autour de moi, au moyen de mon propre monde, tout y étant compris, lié, modelé, reconstruit et recréé sous une forme et une manière qui soient miennes “: rien ne pouvait mieux définir son travail, et celui de tous les peintres attachés à saisir l’étrangeté de l’existence dans leur entourage proche plutôt que dans les voûtes célestes ou la musique des formes abstraites — Vérot est de cette famille — que la formule d’une déconcertante limpidité trouvée sous la plume de l’auteur de Poésie et vérité …/…

Didier Semin, extrait de «La magnificence inclémente du portraitiste misanthrope» (in Cahier de Crimée #21, édition Galerie Françoise Besson

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    et tous les jours sur RDV.